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Aujourd’hui j’ai le plaisir de vous présenter une artiste venue direct du Nord !
Dans cet interview Isabelle va nous raconter ses secrets d’artiste …
Isabelle à l’oeuvre
Où et Comment ?
Les outils
Contrairement à ce qu’on pourrait penser mon outil principal n’est pas le pinceau mais le couteau et le chiffon. Je travaille sur toile, lin ou coton selon les formats. J’utilise essentiellement des toiles 3D, à larges bords, qui donnent un volume intéressant à mon travail (je peints sur des grands formats, parfois plus d’un mètre, et l’épaisseur de la tranche leur donne plus de rigidité). Inconvénient : ce sont parfois des châssis très lourds.
Le matériel
Chevalet à crémaillère, avec roulettes pour pouvoir le déplacer facilement, une table pour pouvoir poser mes tubes, palette, médium, chiffons etc…
Le lieu
Mon atelier à Villeneuve d’Ascq. J’ai la chance d’habiter dans une ancienne usine et j’ai donc beaucoup de place. Mon atelier est vaste et son éclairage est zénithal : la lumière vient de la verrière du plafond. Pas d’éclairage direct sur la toile donc. Idéal Gros gros inconvénient en hiver : il n’est pas chauffé ! Mais un petit poêle à gaz sur roulettes vient compenser.
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
La météo ! La couleur du ciel, le vent ou l’orage, le jour ou la nuit, la douceur de l’air ou la pluie. Toutes les variations atmosphériques. Comme je travaille l’abstraction, il faut bien partir de quelque chose. Disons que le temps qu’il fait est un bon point de départ.
Années d’expérience dans ce métier
Je peins depuis vingt-cinq ans, installée comme professionnelle déclarée à la Maison des Artistes depuis 10 ans.
Quel bilan tireriez-vous sur votre carrière ?
Aucun. Je ne suis pas à l’heure des bilans.
Comment a évolué votre rapport personnel à votre travail de vos débuts à aujourd’hui (toujours la passion) ?
Disons que passer d’une activité de loisirs, ce qui était le cas au début, à une activité censée rapporter de l’argent est assez difficile. On a des charges fixes avec des rentrées d’argent très fluctuantes (surtout avec la crise économique). Et en même temps il ne faut pas penser uniquement « commercial », sinon on perd vite l’envie de peindre ; ne surtout pas peindre en essayant de faire ce qui est dans l’air du temps. Par exemple, depuis quelques années, les tableaux « urbains », vues de New York, taxis jaunes etc… sont très à la mode ; tout le monde s’est mis à en faire. Résultat, on en trouve partout et le public s’est lassé. Il faut être intègre dans ce qu’on fait. Ne peindre que ce qu’on sent. Ne pas peindre parce que « ça va se vendre » tout en sachant qu’il faut vendre à un moment ou à un autre. La quadrature du cercle !
Quel en aurait été le meilleur moment ?
Le meilleur moment pour moi reste le jour où j’ai vendu mon premier tableau à quelqu’un que je ne connaissais pas. Je me suis dit : là, tu es devenue une vraie professionnelle. Quand on débute on vend à la famille, aux amis, mais le jour où vous vendez à un inconnu, vous franchissez un cap !
Faut-il se renouveler ? Comment on peut se renouveler dans un métier lié à l’artistique ?
Le pire serait de ne pas se renouveler, faire toujours la même chose ! Mais la question du « comment » est difficile. Entre mes premiers tableaux et ce que je fais aujourd’hui, le changement est radical. Ça n’est pas venu d’un seul coup. Passer de la figuration à l’abstraction a été un long cheminement. J’ai commencé comme tout le monde, en faisant des copies de tableaux de peintres connus ; et en participant à un atelier de modèle vivant. Donc, tableaux classiques, sur toile. Et puis un jour, après avoir terminé une copie d’un tableau de Claude Gillot qui se trouve au Louvre « le tombeau de maître André », j’ai eu envie de refaire ce tableau mais d’une façon plus moderne. L’artiste avec lequel je travaillais m’a proposé de peindre sur bois avec de l’enduit de bâtiment et des pigments. Ce fut une révélation ! La peinture prenait du relief, elle séchait très vite, on pouvait la poncer, la vieillir, l’user. J’ai donc exploré cette voie-là pendant des années. Du bois, des pigments, les possibilités étaient immenses. J’ai travaillé le thème de Venise pendant plusieurs années, thème qui se prêtait particulièrement bien à ce type de peinture. Ensuite je me suis tournée vers le thème de la femme et du désir. Nus et visages endormis, silhouettes alanguies. Puis le portrait, toujours sur bois, en m’inspirant des portraits du Fayoum, ces visages peints sur sarcophages à l’époque de l’Egypte romaine. Mais il y a 5 ans, mon père est tombé gravement malade ; j’ai tout arrêté pendant plus d’un an pour m’occuper de lui et après son décès, je n’avais plus envie de continuer dans cette voie-là ; je sentais que j’étais arrivée au bout de quelque chose ; je ne me renouvelais plus ; ce que je faisais, je le faisais bien et parfois même très bien, mais l’envie avait disparu. Il n’y avait plus la flamme… je suis donc retournée dans un magasin de beaux-arts, ce qui ne m’était plus arrivé depuis longtemps et j’ai acheté une toile. De retour à l’atelier, j’ai eu envie de bleu ; j’ai donc étalé du bleu sur ma toile. Et petit à petit des nuances sont apparues, plus sombres, plus claires ; des variations subtiles de couleur. Et impossible de dire comment c’est arrivé, mais j’ai réalisé ma première toile abstraite. Et à partir de là, je n’ai plus arrêté. L’abstraction est pour moi un passionnant voyage dans la couleur. Un galeriste à qui je présentais mes nouvelles toiles m’a parlé d’abstraction lyrique en évoquant Zao Wou Ki ! Beau compliment ; pour moi Zao Wou Ki est un maître absolu !
Ma peinture maintenant est à la fois une recherche de transparence dans la couleur (raison pour laquelle je travaille en glacis superposés) et de mouvement.
Le parcours mené pour devenir un professionnel tel que vous ; est-il, selon vous, aisé ou difficile ?
Aisé parce que c’est passionnant et que la passion peut soulever des montagnes, difficile parce que quand on devient professionnel, on fait le choix d’entrer dans un système avec ses contraintes, cotisations sociales, charges etc… et que l’on réalise que beaucoup d’artistes n’ont pas fait ce choix-là, exposent tout de même, en vendant en dehors de toute légalité, ce qui fait que l’on se retrouve face à une concurrence déloyale. Par ailleurs, il y a énormément de marchés de l’art, de salons, d’expositions qui sont organisés et il est très difficile de faire les bons choix quand on débute. On veut exposer coûte que coûte alors qu’il n’est pas toujours opportun d’exposer n’importe où. On perd alors beaucoup de temps et d’énergie dans ces manifestations qui n’apportent pas grand-chose en termes de ventes et de notoriété.
Quelle est l’étape que vous préférez dans la réalisation ?
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1 Comment on Notre Artiste invitée : Isabelle – 1°partie